Cinq raisons pour lesquelles la guerre en Ukraine nous empêche de nous attaquer à la crise climatique.

Article écrit par Jasper Thys, activiste intal pour la paix.

Les tensions entourant la guerre en Ukraine prennent des proportions de plus en plus dangereuses. En attendant, le temps qu’il reste pour une action forte en faveur du climat s’écoule trop rapidement. Pourquoi devons-nous arrêter la guerre en Ukraine si nous voulons nous attaquer à la crise climatique ?

  • La guerre menace de dégénérer en conflit nucléaire

Tous les experts sont d’accord. Jamais, depuis la fin de la guerre froide, nous n’avons été aussi proches d’un conflit nucléaire. Avant la guerre en Ukraine, l’horloge de la fin du Monde était déjà à son point le plus proche de minuit. Entre-temps, Poutine a fait allusion à l’utilisation d’armes nucléaires tactiques dans ses discours, Biden a qualifié la menace nucléaire d’« Armageddon imminent » et Zelensky a demandé à l’OTAN de procéder à des frappes préventives. Plus la guerre se prolonge, plus le danger est grand. Il est impératif d’empêcher l’imprévisible président russe de se sentir acculé et de prendre des décisions fatales. Une véritable guerre nucléaire entraînerait des conséquences dramatiques sur le climat et l’approvisionnement alimentaire. Outre les milliers de victimes immédiates, une guerre nucléaire entraîne un hiver nucléaire. L’excès de poussière, de fumée et de cendres dans l’atmosphère refroidit la surface de la terre de 2 à 5 degrés, ce qui entraîne des pertes massives de récoltes et des famines mondiales. Chaque étape de la chaîne du nucléaire, de l’extraction de l’uranium à l’ « élimination » des déchets nucléaires, cause également de graves dommages à l’environnement. Il est grand temps que tous les pays du monde signent et appliquent le traité d’interdiction des armes nucléaires des Nations unies. Qu’est-ce que la Belgique attend encore ?

  • La guerre accroît les tensions internationales dans le monde

Quelqu’un croit-il que la Belgique, l’Inde, les États-Unis ou l’UE peuvent résoudre la crise climatique à eux seuls ? Il est évident que non. Aucun pays, ou même un petit groupe de pays réunis, ne peut à lui seul réduire suffisamment les émissions mondiales de CO2 pour éviter une catastrophe climatique. Pourtant, nos dirigeants politiques ne font qu’attiser les tensions autour de la guerre en Ukraine. Ainsi, une solution à la crise climatique s’éloigne de plus en plus du champ de vision. Ursula Von der Leyen a récemment rejeté une solution négociée à la guerre en Ukraine. Elle souhaite « faire payer les Russes ». Alexander De Croo, quant à lui, a décrit les négociations avec la Russie comme « une conversation avec un lavabo ». L’OTAN, avec les États-Unis en tête, semble particulièrement désireuse d’affaiblir la Russie autant que possible, quelles que soient les conséquences pour le peuple ukrainien et le reste du monde. Pendant ce temps, ils se préparent à un scénario similaire contre la Chine, cet autre « rival systémique ». Plutôt que de lancer une nouvelle guerre froide, mieux vaut miser sur une coopération constructive et une architecture de sécurité commune. Dans le cas contraire, les mesures qui restent encore à prendre en matière de climat ne serviraient, si elles sont prises, pas grand-chose.

  • La guerre fait augmenter les dépenses militaires

Nos gouvernements dépensent de plus en plus pour leurs armées et leurs armements. En 2021, les dépenses militaires atteignent le chiffre record de 2 100 milliards d’euros. Les investissements mondiaux dans les énergies renouvelables ont dû se contenter de 750 milliards de dollars cette année-là, ce qui illustre parfaitement où se situent les priorités. L’OTAN représente plus de la moitié des dépenses militaires mondiales et les États-Unis, eux, en sont le leader absolu. Ils dépensent autant d’argent que les 9 pays suivants qui complètent le top 10 des dépenses militaires. Inévitablement, la guerre en Ukraine fait grimper les dépenses militaires mondiales. Partout, les gouvernements profitent de la guerre pour investir d’énormes budgets dans leurs armées. Trois jours après l’invasion russe, l’Allemagne a décidé de débloquer 100 milliards d’euros pour développer ses capacités militaires. Sur le plan intérieur, en Belgique, le gouvernement De Croo, avec le soutien des Verts et de Forward, a décidé de consacrer 2 % de notre PIB – comme l’exige l’OTAN – à l’armée d’ici 2035. Quelle différence une fraction de cet argent ferait-elle dans la lutte contre la crise climatique ? Au lieu de s’engager pleinement dans l’action climatique, nos gouvernements gaspillent de l’argent dans une course aux armements inutile.

  • La guerre est un désastre pour les émissions mondiales de carbone

Les activités militaires sont toujours un désastre pour le climat. Mais la guerre en Ukraine contribue déjà de manière radicale à une augmentation spectaculaire des émissions mondiales de CO². Il suffit de penser au sabotage de Nord Stream 1 et 2, à un moment où nous devons absolument réduire les émissions, une quantité massive de méthane est relâchée, dont on estime qu’elle équivaut aux émissions annuelles d’une ville comme Paris. Plusieurs politiciens, journalistes et commentateurs politiques ont également espéré que la guerre en Ukraine accélérerait la transition vers la production d’énergie renouvelable, c’est néanmoins le contraire qui est observé. Des pays comme l’Allemagne, l’Italie et la Bulgarie reviennent au charbon, qui est extrêmement polluant. Nous importons maintenant plus de gaz liquéfié des États-Unis que jamais auparavant. Cette énergie est produite par fracturation, un procédé d’extraction extrêmement polluant et coûteux qui constitut également un désastre pour le climat et pour la classe ouvrière. Evidemment, les sanctions contre la Russie ne permettent en rien d’améliorer cette situation. La Russie rejette chaque jour 4,3 millions de mètres cubes de gaz dans l’atmosphère parce qu’elle ne peut et ne veut plus le vendre à l’Europe. Ainsi, il semble que nous nous tirons une balle dans le pied. Les travailleurs ordinaires souffrent de la hausse vertigineuse des prix de l’énergie alors que les entreprises de combustibles fossiles connaissent la période la plus rentable de leur histoire et, pendant ce temps, nous détruisons le climat avec toujours plus rapidement, tous en même temps, ça en est presque incroyable.

  • La guerre détourne l’attention des médias et de nos politiciens.

Fin février, juste après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié un deuxième rapport d’une série de trois sur le changement climatique. Le rapport n’a reçu pratiquement aucune couverture médiatique et est apparu sous forme de note de bas de page dans les principaux journaux. Ainsi, les publications les plus importantes sur la crise climatique sont tout simplement ignorées en temps de guerre. Lorsque nos dirigeants politiques et les médias souffrent de la fièvre de la guerre, l’attention portée aux autres défis sociétaux passe très vite au second plan. Cela nous éloigne toujours plus des solutions dont nous avons besoin pour mettre fin à la crise climatique. Si nous voulons que la crise climatique reste à l’ordre du jour politique et public, nous devons éviter que les guerres continuent à remplir les journaux et les actualités.

Sans paix, pas de justice climatique !

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